Fédération Grand-Est STOP déchets nucléaires
Madame, Monsieur,
Vous m’avez interpellée à propos de l’enfouissement des déchets radioactifs à vie longue, et en particulier sur le site de Bure.
Je suis bien entendu, comme le mouvement EELV, opposée à l’enfouissement en profondeur des déchets radioactifs pour de nombreuses raisons tant techniques qu’environnementales mais avant tout éthique et morales.
Je ne vois pas de quel droit notre génération « cacherait » ses pires déchets dans le sous sol avec un énorme risque d’en perdre la trace et la mémoire. Autant nous sommes émerveillés quand nous découvrons des vestiges romains ou préhistoriques, autant nous n’avons pas le droit d’en faire autant de nos déchets.
Les écologistes ont toujours combattu le programme nucléaire mais sont parfaitement conscients de la responsabilité qui malheureusement incombe à tous, nucléocrates, anti-nucléaires, sans opinion… d’en assumer la suite.
Vous le savez nous défendons une stratégie de sortie du nucléaire, d’arrêt immédiat des filières retraitement et Mox et des projets d’enfouissement. Concernant les combustibles usés (et les verres dont nous héritons), nous défendons leur stockage réversible à sec en sub-surface (sur site de préférence) qui nous apparaît comme un bon compromis entre exigence de sûreté et de surveillance prolongée. Mais de toute façon cela devra faire l’objet d’un large débat et d’analyses et expertises approfondies et pluralistes.
Pour les sites et territoires particulièrement nucléarisés, nous défendons aussi une transition industrielle et économique avec notamment la création de centres d’excellence pour le démantèlement et la gestion des déchets (recherche, formation, expérimentation etc). Il nous paraît en effet indispensable de ne pas pénaliser ces territoires souffrant généralement de mono-indutrialisation mais bien d’accompagner aussi leur transition. Nous aurons par ailleurs besoin des compétences et savoirs faire des salariés actuels de l’industrie nucléaire.
Concernant Bure en particulier, nous savons que théoriquement, le débat public devrait avoir lieu en 2013. Il va sans dire que cela n’aura pas lieu si je suis élue Présidente de la République puisque j’abandonnerai le projet d’enfouissement. Mais, quoi qu’il arrive, nous veillerons à ce que ce débat ne puisse se tenir avant les décisions plus larges sur la politique énergétique de notre pays puisque, même si les déchets existent, la question de savoir combien seront créés à l’avenir reste un déterminant majeur. L’opportunité même de l’enfouissement sera évidemment questionnée, pas seulement la profondeur des galeries ou la couleur des peintures.
Le combat que vous menez est courageux dans une région en mal de perspective économiques. Nous savons que le « labo » génère des flux de financement et qu’il nous appartiendra d’accompagner les territoires concernées dans l’élaboration d’alternatives également économiques et sociales, de véritables projets de territoire.
Enfin, je vous remercie pour votre invitation à venir vous rencontrer sur votre territoire. Le temps de la campagne électorale est contraint et complexe à gérer mais mon équipe reviendra vers vous pour en évaluer la faisabilité.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, mes très sincères salutations.
Eva Joly