Cher-e-s ami-e-s,
Vous êtes ici réuni-e-s autour du réseau Education Sans Frontières, un réseau dont il ne faut plus saluer ni l’importance pour la vigueur de la démocratie en France, ni le courage des militants. Chacun d’entre vous est ici car il ou elle a rencontré, au cours de sa vie, des migrants – hommes, femmes, enfants – dont l’histoire risquait d’être chamboulée, parfois même dont la vie risquait d’être mise en danger. Vous battant contre les lois injustes de la République, vous avez été les premières cibles d’autorités qui avaient peur de ce « délit de solidarité », mais vous avez surtout fait preuve de bravoure et d’humanité. Vous êtes ce que j’appelle des héros ordinaires.
En dix ans, le paysage réglementaire de l’immigration aura considérablement changé : cinq lois ont, depuis 2002, modifié les règles sur l’entrée et le séjour des étrangers ou l’acquisition de la nationalité. La politique s’est faite de plus en plus restrictive, menée par un Ministère de l’Identité nationale – termes odieux s’il en est ! – puis de l’Intérieur, ayant toujours plus de prérogatives, prérogatives d’État mais aussi prérogatives discrétionnaires sur la vie des migrants et de leurs familles.
Limitation de l’immigration de droit (mariage, regroupement familial, asile) ; durcissement des conditions d’acquisition de la nationalité ; manque cruel de moyens d’accueil notamment dans les préfectures ; poursuite de l’idéal « d’immigration choisie » ; politique du chiffre et même désormais, contre ces étudiants étrangers hautement diplômés et très bien intégrés ; rien n’y manque ! Les étrangers, quelques soient leurs parcours, sont bel et bien les boucs émissaires d’un gouvernement en mal de projet porteur d’espoir, d’un gouvernement qui cherche à expliquer pourquoi, contre toutes leurs promesses, le chômage et la précarité sont toujours aussi élevés…
En ce début de semaine, monsieur le Ministre de l’Intérieur et de l’Immigration Claude Guéant faisait du zèle : il aurait dépassé les objectifs avec 30% de reconduites à la frontière supplémentaires, et des milliers de titres de séjour accordés en moins. Pas de quoi se gargariser monsieur Guéant, ce sont bien des hommes, des femmes, des enfants qui sont derrière ces chiffres ! Derrière les 33 000 reconduites à la frontière organisées en 2011, combien d’enfants, combien de vies détruites, combien de déchirures familiales et personnelles ?
En ce début d’année 2012, alors que toutes les crises, économique, financière, sociale et environnementale, n’ont jamais été aussi fortes, la persistance de votre combat est essentielle. Elle donne espoir à tous ceux qui souhaitent retrouver la France des droits humains, la France de l’égalité.
J’aurai à cœur, pendant toute cette campagne, de mettre au centre de mon discours le manque de respect des droits des étrangers, légaux ou illégaux ; la disproportion des moyens entre les sommes investies dans les reconduites à la frontières et les dispositifs d’intégration ; le besoin de rétablir l’égalité de tous, dans la vie politique et citoyenne à travers le vote des étrangers, mais aussi dans l’accès à l’emploi ou à la santé.
Je veillerai à redonner à l’école un rôle central : en faisant de chacun, enfant, parent, immigré, un acteur de la vie scolaire à part entière, pendant et en dehors des heures de cours.
Et je veillerai enfin à faire reconnaître l’engagement de chacun pour un monde empli de justice.
Très belle année 2012 à vous !